PROJETS - RESSOURCES PHYTOGENETIQUES

INTRODUCTION

La région de Douiret fait partie de la chaîne des Matmata qui représente une zone de transition entre le Sahara qui commence par le Dhahar en allant vers le sud-ouest et la région des plaines (Jfara) qui se poursuit jusqu’à la côte. Cette zone de transition abrite un immense patrimoine phytogénétique bien adapté aux conditions locales et qui pourrait être utilisé de part et d’autre de cette zone. La région de Douiret est connue depuis très longtemps par ses traditions agricoles. L'agriculture pratiquée est du type pluvial. Les plantations fruitières sont installées essentiellement derrière les Jessours (digues installées sur les bassins versants et les ravins pour collecter les eaux de ruissellement et les sédiments). Elles comportent différentes espèces : olivier, figuier, palmier dattier, vigne, grenadiers, amandier, pommiers.

Les changements socio-économiques des dernières décennies ont profondément touché la région. L’abandon de certains Jessours, la raréfaction voire la disparition de certaines variétés fruitières et du savoir faire local et le changement du paysage typique de la zone deviennent des faits réels. A cela s’ajoutent les effets néfastes de la sécheresse qui sévit depuis quatre années. Face à ceci, il devient urgent d’entreprendre des actions de sauvegarde de ce patrimoine biologique et technologique.

 

DIVERSITE DES RESSOURCES PHYTOGENETIQUES LOCALES

La diversité des ressources phytogénétiques locales provient de la diversité du milieu. En effet, la topographie de la région est très accidentée. On rencontre des montagnes de quelques centaines de mètres d’altitude, des collines, des sortes de plateaux et des oueds. Différents biotopes sont définis. De très nombreuses espèces spontanées pérennes et annuelles sont rencontrées. Les espèces cultivées (surtout durant les années pluvieuses) sont également assez nombreuses. On retrouve des céréales (orge, blé dur, blé tendre), des légumineuses à graines (lentilles, pois chiche, petit pois, fève…), des cucurbitacées (pastèque, melon, potiron), etc. Comme espèces fruitières, On retrouve l’olivier, le figuier, le palmier dattier, la vigne, l’amandier, le pommier, etc. Toutefois, les trois premières espèces (olivier, figuier et dattier) prédominent.

Les variétés de figuier sont toutes locales issues d’une sélection paysanne durant des siècles. Au cours du temps, quelques unes ont reçu des noms qui rappellent, souvent, des caractéristiques des fruits (couleur, forme…). Certaines produisent deux générations de fruits par an (ex : Bither Abiadh) et d’autres donnent uniquement des figues d’été (ex : Zidi). D’autre part, pour quelques unes la caprification (pollinisation artificielle par apport de figues mâles) est indispensable (ex :Ragoubi), alors que d’autres peuvent produire sans caprification (ex : Hammouri). Cette diversité observée gagnerait plus d'intérêt en considérant les caractéristiques adaptatives des variétés domestiquées depuis des temps très lointains dans ces endroits ayant une importance écologique considérable. On pourrait assimiler la chaîne des Matmata à un microgenecenter à l'intérieur du pool génétique primaire de l'espèce figuier. Par conséquent, la nécessité de conserver ces ressources provient de leur diversité, leur originalité et des risques d'érosion qui pèsent dessus. Certaines variétés sont encore à répartition assez large (Zidi, Magouli…). D’autres, par contre, deviennent assez rares (Roummani, Ragoubii…). Certains cultivars, en particulier ceux à caprification obligatoire, se trouvent menacés de disparition et méritent une attention particulière pour leur sauvegarde.

Classés en quatre groupes principaux .

  • Moghzazi (Taghzazt) : les fruits se consomment frais au stade Bleh : dattes incomplètement mûres.

  • Rotbi (Taradbit) : les fruits se consomment essentiellement frais au stade Rtob : stade plus avancé que Bleh, les dattes se ramollissent.

  • Temri (Tatemrit) : les fruits mûrs se consomment après séchage soit directement (Tamr) soit dénoyautés (Cheddakh)

  • Moghrassi (Tayardhoumt) : les fruits frais sont très astringents, ne peuvent être consommés qu’après séchage

DIFFERENTES UTILISATIONS TRADITIONNELLES DES VARIETES FRUITIERES LOCALES

Les productions fruitières locales sont assez diversifiées et se prêtent à différentes utilisations. Les figues fleurs (Bither) sont généralement consommées en frais. Les figues d’été peuvent être consommées fraîches (fruits de table) ou séchées. Les habitants de la région maîtrisent très bien les techniques de récolte favorisant la préservation de la qualité des figues fraîches; Le séchage se fait naturellement au soleil dans des endroits bien exposés (Mechraha). Les figues mures (pré-séchées ou non sur l’arbre) sont ramassées et exposées sur une couche d’Alfa (Stipa tenacissima) ou autre plante "aromatique" locale. Les figues pré-séchées sur l’arbre donnent ce qu’on appelle localement Gharbouz ou Gabbab (figues sèches fermées). Les figues récoltées à maturation optimale puis écrasées et séchées donnent le Chrih (ou Chriha). Les fruits ainsi séchés peuvent être conservés durant des mois voire toute une année ou plus dans des sacs tressés ou bien des paniers confectionnés localement. Elles constituent un produit riche et très énergétique bien apprécié par la population locale et sur les marchés.

Les variétés d’olivier locales peuvent être exploitées à double fin. Les olives peuvent être récoltées vertes ou noires pour être conservées traditionnellement et utilisées comme olives de table (Tazilla). Elles peuvent être récoltées mures pour en extraire l’huile de qualité. On procède également au séchage des olives mures pour les conserver. Elles servent par la suite pour la consommation directe ou bien pour l’extraction de l’huile au moment voulu.

Les dattes comestibles peuvent être récoltées à différents stades de maturation pour être consommées directement (Bleh et Rtob) ou bien conservées (Tamr). Elles peuvent être dénoyautées et conservées pendant plusieurs mois (Cheddakh). Elles sont très bien appréciées pendant l’hiver et le printemps.

Aussi bien les figues que les dattes sèches (Temri et Moghrassi) sont utilisées par la population locale pour la production du Rob très apprécié dans les cérémonies locales. Il s’agit d’un sirop très concentré et très énergétique produit de façon traditionnelle. Il est à signaler que ce sont surtout des personnes âgées qui maîtrisent cette technologie assez délicate. Une infusion froide appelée Ngouâ est produite à partir de figues sèches. En outre, les figues Magouli et Tayouri sont utilisées pour la production traditionnelle de vinaigre. Les jeunes figues non amères (Fargous) des variétés Magouli, Bither Abiadh et Roummani se consomment comme légumes cuits avec le couscous.

Les différents sous produits des oliviers, des figuiers et des palmiers dattiers (fruits de mauvaise qualité, feuilles, branches, bois de taille, etc) sont utilisés à différentes fins : alimentation du bétail (figues Makhbech), construction d’abris et d’étables, articles de menuiserie locale, bois de feu, clôtures, brise-vents individuels pour les jeunes plantations, etc.

 







Etude réalisée par : Dr Messaoud MARS et Dr Habib KHEMIRA



Siège :
Douiret 3232 Tataouine - Tunisie
Tél/Fax : (+216)75878066
Email : resa@asnaped.org
Bureau de Tunis :
40 Rue Le Bacha, 1006 Tunis - Tunisie
Tél/Fax :(+216)71570102
Email : info@asnaped.org

WebMaster : Mounira Chiouchiou